Comment modifier vos règlements
Table des matières
Besoin de modifier vos règlements?
Les règlements administratifs sont des règles juridiquement contraignantes que les organisations à but non lucratif (OBNL) mettent en place pour régir leur fonctionnement, y compris certains processus décisionnels clés. Cet article passe en revue les principes qui s’appliquent lors de la modification de vos règlements. Nous le publions en partie parce que la pandémie de la COVID-19 a obligé certaines organisations de modifier rapidement leurs règlements, notamment pour permettre la tenue à distance de assemblée générale annuelle (AGA) de leurs membres.
Changements gouvernementales sur les réunions à distance
En ce qui concerne la question spécifique des rencontres à distance, le gouvernement du Québec a annoncé une mesure temporaire permettant la tenue à distance d’assemblées et de réunions pour les organismes à but non lucratif constitués en société au Québec, même si leurs lettres patentes ou règlements administratifs l’interdisent. Les organismes à but non lucratif enregistrés au fédéral ont la possibilité d’éviter de tenir une assemblée générale annuelle en personne, notamment en demandant à Corporations Canada l’autorisation de retarder la convocation d’une telle assemblée.
Gardez à l’esprit que ce message est une information générale et ne couvre pas toutes les circonstances possibles. En cas de doute, consultez un·e conseiller·e juridique!
Deux processus généraux pour changer vos règlements
Il existe deux processus différents pour adopter, modifier ou abroger un règlement, dépendamment de ce que vous essayez de changer! La Loi sur les compagnies du Québec et la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif, au fédéral, exigent un processus plus exigeant pour des questions importantes comme la modification de votre acte constitutif (lettres patentes ou statuts) ou la dissolution de la société. Il existe un processus moins complexe pour tous les autres changements aux règlements. Les deux lois se concordent quant à nombreux (mais pas tous) les changements qui nécessitent un processus plus exigeant, donc comme d’habitude, il est important de savoir si votre organisme à but non lucratif est incorporé en vertu de la loi fédérale ou provinciale.
Le premier processus de modification des règlements
Lorsqu’elles adoptent, modifient ou abrogent des règlements qui ne touchent pas aux questions les plus importantes, les organisations peuvent généralement suivre le processus en deux étapes décrit ici (avec quelques détails plus loin):
- Premièrement, le conseil d’administration doit adopter le changement au règlement à la majorité simple des voix. Le changement prendra effet immédiatement.
- Deuxièmement, lors d’une assemblée générale subséquente, les membres doivent voter pour ratifier le changement qui avait été précédemment adopté par le conseil d’administration, à nouveau à la majorité simple des voix. Si les membres ne ratifient pas le changement de règlement dans le délai requis ou votent contre, le changement cesse d’avoir effet à partir de ce moment, sinon il demeure en vigueur indéfiniment.
Les détails sur le moment où les membres votent ces changements diffèrent si vous êtes constitué au Québec ou au niveau fédéral. Consultez la dernière section de ce document pour plus de détails.
Deuxième option pour les changements de règlement
Pour les changements qui touchent aux questions les plus importantes, le processus est plus complexe en trois dimensions:
- Premièrement, le changement n’entre en vigueur qu’après avoir été approuvé lors d’une assemblée générale. En d’autres termes, le conseil d’administration ne peut pas à lui seul modifier immédiatement les règlements.
- Deuxièmement, pour que la résolution de l’assemblée générale soit adoptée, il faut généralement une majorité plus large, très souvent une majorité des deux tiers des voix.
- Dans certains cas, le changement n’entre en vigueur qu’après une formalité supplémentaire, après l’approbation de l’assemblée générale. C’est notamment le cas lors de la modification de l’acte constitutif de l’organisation, auquel cas la modification implique le dépôt ultérieur de la modification auprès du bureau des sociétés compétent (Registraire des entreprises du Québec ou Corporations Canada).
Ce processus plus lourd s’applique, par exemple, à la dissolution de l’organisation ou à la modification de ses lettres patentes. Si vous êtes constitué en personne morale en vertu de la Loi sur les compagnies (Québec), la modification du nombre de sièges au conseil d’administration doit suivre ce processus plus exigeant, y compris le dépôt d’un formulaire auprès du Registraire des entreprises après l’assemblée générale.
Principes généraux sur la modification des règlements
Dans les deux cas, pour être valides, les règles contenues dans les règlements doivent toujours être conformes à:
- L’acte constitutif de l’organisation (lettres patentes ou statuts);
- La loi.
Exemple: Changer la durée des mandats du CA
Bien que les règlements administratifs puissent définir de manière valable la durée du mandat des administrateurs, ils ne peuvent pas définir cette durée comme étant de 20 ans, puisque ces mandats sont limités à un maximum de quatre ans pour les organismes à but non lucratif qui relèvent de la loi fédérale, et deux ans pour les organismes à but non lucratif qui relèvent de la loi québecoise.
Exemple: Changer sa mission
Pour un deuxième exemple, un changement des règlements administratifs d’un organisme à but non lucratif modifiant ses objets pour indiquer que l’organisme vise à établir des bibliothèques communautaires à travers la province de Québec sera inefficace si l’acte constitutif de l’organisation énonce que l’objet de l’organisme est d’établir des bibliothèques communautaires à travers la ville de Montréal, parce que les activités d’un organisme à but non lucratif sont limitées par ses objectifs énoncés dans son acte constitutif, qui prime sur ses règlements administratifs.
Exemple: Changer la date de son AGA
Enfin, concernant une question qui revient souvent dans le contexte de la pandémie de la COVID-19, considérons une organisation dont les règlements exigent que son assemblée générale annuelle se tient dans les quatre mois suivant la fin de son exercice. Si l’organisation veut retarder son AGA au-delà de ce point, le conseil d’administration peut modifier ses règlements pour prolonger la période de tenue de l’AGA. Ce changement prend effet immédiatement, avant même la tenue de l’AGA. Les organismes à but non lucratif du Québec, dans cet exemple, doivent également garder à l’esprit que le report de leur AGA au-delà de quatre mois après la fin de leur exercice risque de compliquer les états financiers qu’ils doivent présenter à l’AGA. En effet, la Loi sur les compagnies exige qu’un organisme à but non lucratif opérant au Québec présente des états financiers qui incluent un bilan dressé à une date ne précédant pas plus de de quatre mois l’assemblée et un relevé général des recettes et des dépenses pendant l’exercice se terminant à la date la plus rapprochée de ce bilan.
Notez que cette approche ne peut pas être utilisée pour reporter indéfiniment une assemblée générale annuelle, les lois fédérales et québécoises indiquant qu’elle doit avoir lieu chaque année (bien que les deux lois définissent la date de fin de ce délai différemment).
Les organismes à but non lucratif fédéraux devraient garder à l’esprit la page Corporations Canada mentionnée plus tôt dans cet article grâce à laquelle ils peuvent demander la permission de reporter leur AGA au-delà de ce délai légal en raison de la COVID-19.
Avant d’aller de l’avant, vérifiez si les modifications aux règlements que vous souhaitez apporter sont limitées par la loi ou par votre acte constitutif.
Différences entre les organisations relevant des lois provinciales et fédérales
Les deux sections suivantes énumèrent certains détails spécifiques à garder à l’esprit selon que le changement est effectué pour un organisme à but non lucratif du Québec ou fédéral.
Organismes sans but lucratif du Québec
Lorsque vous modifiez les règlements administratifs d’un organisme sans but lucratif régi par la partie III de la Loi sur les compagnies du Québec, notez que:
- Les modifications apportées selon la procédure simplifiée décrite précédemment doivent être ratifiées avant la fin de la prochaine assemblée générale annuelle (AGA) de l’organisation. Le conseil d’administration n’est nullement obligé de proposer la modification pour ratification à toute assemblée générale extraordinaire qui pourrait se tenir entretemps, bien qu’il le puisse s’il le souhaite.
- Les modifications qui suivent la procédure plus lourde mentionnée ci-haut comprennent une modification du nombre de sièges au conseil d’administration.
- Les modifications qui suivent la procédure plus lourde mentionnée ci-haut ne peuvent être apportées que lors d’une assemblée générale spéciale. Une organisation qui souhaite éviter de convoquer des réunions annuelles et extraordinaires distinctes pour traiter des questions spécifiques à chacun peut simplement convoquer une seule « assemblée générale annuelle et extraordinaire ».
- Pour de nombreux changements qui n’affectent que les dirigeants (par exemple le poste du président ou du secrétaire) ou les employés, la ratification par les membres n’est pas requise. Plus précisément, la ratification n’est pas nécessaire pour les questions que la Loi sur les compagnies définit comme: « la nomination, les fonctions, les devoirs et la destitution de tous dirigeants, agents et employés de la personne morale, le cautionnement à fournir par eux à la personne morale et leur rémunération ».
- Les membres ne peuvent pas proposer leurs propres modifications aux règlements, ni modifier ceux proposés par le conseil d’administration. Ils ne peuvent voter que pour ratifier ou rejeter les changements du conseil d’administration. Dans la pratique, les membres d’une assemblée générale peuvent parfois refuser de ratifier la mesure proposée par le conseil d’administration à moins que le conseil d’administration n’apporte les modifications qu’il précise. L’assemblée générale peut ensuite être brièvement ajournée assez longtemps pour que le conseil d’administration se réunisse et adopte les changements requis par les membres.
- Parmi les règles de la Loi sur les compagnies que les règlements généraux ne peuvent pas contredire, il y a le processus de modification des règlements administratifs eux-mêmes. Par exemple, les règlements ne peuvent pas spécifier de manière valide que toute modification future des règlements doit d’abord être approuvée par une entité externe pour être valide. De même, une disposition des statuts stipulant que « l’assemblée générale des membres est souveraine » contredirait, entre autres, la règle selon laquelle seul le conseil d’administration peut proposer des modifications aux règlements.
- Les règlements qui restreignent abusivement le pouvoir des membres, même d’une manière qui n’est pas explicitement contraire à la Loi sur les compagnies, risquent également d’être jugés invalides.
Organismes sans but lucratif fédéraux
Lorsque vous modifiez les règlements généraux d’un organisme sans but lucratif régi par la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif, notez que :
- Les modifications apportées à la suite du moins lourd des deux processus doivent être ratifiées avant la fin de la prochaine assemblée générale des membres qui se tiendra, qu’il s’agisse d’une assemblée annuelle ou extraordinaire.
- Les membres ont le pouvoir de modifier les règlements généraux proposés par le conseil d’administration, ou même de proposer leurs propres règlements sans que le conseil d’administration n’en ait proposé, pourvu qu’ils respectent les procédures établies par Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif. Si la modification des règlements généraux est initiée par un membre plutôt que par le conseil d’administration, cela comprend la prise en compte des mesures décrites pour que le changement soit inclus dans l’avis de convocation.
- Tous les changements aux règlements doivent être soumis à Corporations Canada dans les 12 mois. Notez qu’il ne s’agit pas d’une formalité requise pour que les statuts restent en vigueur : ils entrent en vigueur avant d’être soumis, et ils restent en effet en vigueur même si les modifications ne sont jamais soumises (bien que dans ce cas l’organisation s’expose à d’autres sanctions).
- Il est à noter que la loi limite la façon dont les règlements généraux peuvent établir à la fois la façon dont l’avis de convocation aux assemblées générales est donné, ainsi que la façon dont les membres absents peuvent voter à ces assemblées et la façon dont ils le font. Dans les deux cas, la Loi permet à une organisation d’obtenir la permission de Corporations Canada pour utiliser une autre approche dans ses règlements administratifs.
- Certaines modifications apportées à l’adhésion ou aux droits d’adhésion entrent dans la catégorie nécessitant le processus plus complexe. Dans les organismes sans but lucratif avec plusieurs catégories de membres, le processus d’approbation des modifications à ces questions est encore plus lourd, et chaque catégorie de membres – même les catégories qui n’ont pas le droit de vote – doit approuver séparément les résolutions par une majorité renfoncée pour que le changement soit effectué de manière valide.
Information légale pour les OSBL au Québec
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Ce billet de blog a été écrit par Mark Phillips, un avocat qui conseille des organisations à but non lucratif et caritatives. On peut le joindre à avocat@markphillips.ca. Aucune information dans ce billet de blog n’est un conseil juridique: veuillez consulter un avocat pour recevoir des conseils concernant la situation de votre organisation.